Coup de coeur et silence radio
Je suis privilégiée de pouvoir me déplacer pour assister à des rencontres. Bien souvent ça tombe bien, car j’ai besoin de me ressourcer et de me remonter le moral tellement le défi au Québec est immense.
Je voudrais, ici, remercier les membres du CA de la caacQ, qui me font confiance et me suivent dans les initiatives proposées. Certaines n’ont pas encore abouties mais on doit être patients et, entre temps, d’autres projets voient le jour.
Il y a quelques semaines, je vous ai parlé de la Humane Alliance située en Caroline du Nord si vous n’avez pas encore visionnée leur vidéo, c’est un must.
J’y ai passé 3 jours et assisté à 5 conférences portant sur la stérilisation de masse (aussi appelée stérilisation en volume). Mais c’est lors de la dernière journée que je suis tombé en amour. Oui, en amour avec un camion. Un camion qui sauve des vies. Une unité mobile de stérilisations.
Suite à la demande de la Humane Alliance, l’ASPCA de New York avait fait le trajet pour présenter un de ses 5 camions qui sillonnent à l’année longue les rues de la Big Apple pour stériliser les animaux.
WOW WOW WOW, bouche bée, je suis restée. Et une fois revenue sur terre je planifie déjà dans ma tête comment je peux organiser la visite d’une de ces unités mobiles à Ville de Laval mais attention je veux que ce soit la plus grosse…
Notre réseau Nord-Américain et la confiance de mes collègues m’ont permis en avril 2012 de présenter aux élus et au gouvernement ce bel outil pour sauver des vies.
Une anecdote en passant. En préparation de ce week-end, nous avons cru bon d’inviter l’Ordre des médecins vétérinaires du Québec (OMVQ). Nous avons naïvement pensé que notre initiative aurait permis de rassembler les énergies et aurait créé une ère nouvelle de coopération entre organismes oeuvrant pour une même cause : le bien-être animal.
Comme nous étions naïfs en décembre 2011 lorsque nous avons commencé à parler avec l’OMVQ et à prendre rendez-vous avec le conseil d’administration pour une rencontre, en janvier 2012.
Présentation. Lettre officielle invitant l’OMVQ à se joindre à nous (nous ne demandons pas d’argent, tous les frais sont déjà couverts). Appels. Messages laissés. Silence radio.
Nous décidons de continuer sans eux. Que voulez-vous.
Pour la petite histoire, le jour où nous présentons l’unité mobile aux élus municipaux et à la presse, à notre grande surprise le Dr. Joël Bergeron, président de l’Ordre, se présente sur les lieux.
Très discret, il écoute les experts de l’ASPCA (American SPCA). Un apprivoisement… le président est en terrain méconnu.
Nous sommes en avril 2012. Silence radio jusqu’en juin 2013, l’été où l’OMVQ adopte les normes pour ce qu’ils appellent des stérilisations ciblées (j’aime comment l’Ordre utilise les mots… une chambre à gaz devient avec eux un cabinet d’euthanasie et les stérilisations en volume deviennent ciblées). Je suis bien contente d’apprendre la nouvelle mais… car il y a un mais…
Je réalise que l’accès à la stérilisation ciblée est très limitée on pourrait même dire discriminatoire. Je m’explique :
# 1 L’OMVQ exige qu’un vétérinaire soit membre du CA des organisations à but non lucratif qui désirent effectuer des campagnes de stérilisations (en volume).
Les refuges vous diront ouvertement qu’ils ont de la difficulté à obtenir la coopération des vétérinaires pour des services pour leurs animaux.
# 2 L’OMVQ exige que seules les familles à faibles revenus puissent obtenir ces services (on parle de stérilisation, uniquement).
Lors d’une réunion à Montebello sur le sujet, j’ai posé la question sur la validité de ces critères basés uniquement sur les revenus.
On m’a répondu que les lourdeurs administratives qu’ils engendrent ont fait en sorte que ceux qui les ont adoptés un temps, les ont laissé de côté afin d’investir dans du personnel et obtenir le plus de stérilisations possibles. Les résultats ont été au rendez-vous, à chaque fois que des stérilisations ont été faites en volume, on a pu constater une diminution de la prise en charge des animaux en refuges.
# 3 L’OMVQ permet que les chats communautaires soient stérilisés
Ils sont drôles… dans la vraie vie, les cliniques et hôpitaux vétérinaires ne sont pas organisés pour accueillir en nombre ces chats potentiellement porteurs de maladies. Les cliniques et hopitaux vétérinaires ont été conçus pour recevoir des clients sur rendez-vous alors, oui, je comprends qu’ils soient bien contents que des organismes s’occupent d’une population qu’ils n’ont généralement pas les moyens de prendre en charge !
Mais allons un peu plus loin et regardons comment les choses se passent dans la vie de tous les jours. Brigitte a deux chats chez elle. Mais elle en nourrit trois qui viennent régulièrement la visiter. Ceux-ci ne rentrent pas dans la maison, pour elle se sont des chats communautaires. Brigitte a un travail. Avec son mari, ils ont un revenu qui leur permet d'élever leurs deux enfants.
Selon les critères de l'OMVQ, Brigitte pourrait-elle se rendre à l'unité mobile pour faire stériliser les trois chats communautaires qu'elle nourrit ? Comment va-t-on établir que ce sont bien des chats communautaires ? Comment être certain que ce ne sont pas en fait ses chats à elle ? (et, elle, elle n'est pas assez démunie pour pouvoir bénéficier du programme…).
Vous me direz, tout cela est bien hypothétique… car il n'y a pas d'unité mobile en service !! et pour cause !! quand vous vous penchez sur la question et commencez à comprendre que ce qui vous est demandé n'est pas simplement de stériliser des chats et des chiens mais de profiler vos interlocuteurs afin de savoir dans quelle case les mettre et s'ils sont ou non des candidats possible à la stérilisation… vous refermez le dossier et investissez les $300,000 de l'unité mobile dans l'achat d'un condo !!
#4 Au final, ces arbitraire, établis par l’OMVQ, n’aident en rien à la résolution des vrais enjeux de notre société.
Prenons, par exemple, le dossier des PittBulls qui se reproduisent en quantité ahurissante, et qui finissent dans les congélateurs ; on estime aux États unis qu’annuellement sur les 4 millions de chats et chiens tués dans les refuges et fourrières 1 million sont des PittBull ; ceux-ci représentent 25% de la population animale tuée ! Peut-on m’expliquer pourquoi nous devons nous préoccuper des revenus des personnes qui viennent faire stériliser leur animal ? N’est-il pas plus important d’ouvrir toute grande les portes, de les accueillir chaleureusement plutôt que de commencer à leur poser des questions sur leur revenus ? Doit-on avoir un inspecteur de RQ avec nous lors des campagnes de stérilisation ? Ne sommes nous pas en train de nous tromper de débat ?
Et puis, sans parler des PittBull, nous savons tous que les refuges et les centres d’adoption ont beaucoup de difficultés à faire adopter les chiens de 50lbs, eux aussi sont victimes de notre manque de compréhension de la situation sur le terrain.
Rapidement, je vous promets, je reviens sur le sujet avec des solutions.